G.-J.B. Target (1733-1807)

Un glossaire des termes rencontrés

Gagne-denier

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ENC

 

GAGNE-DENIER, s. m. (Commerce) homme fort & robuste dont on se sert à Paris pour porter des fardeaux & marchandises en payant une certaine somme, dont on convient à l'amiable. On les nomme aussi porte-faix, crocheteurs, forts, hommes de peine, plumets, garçons de la pelle, tireurs de moulins, &c.

Ils servent pour la plûpart sur les ports, & ont leurs salaires reglés par les prevôt des Marchands & échevins : ils composent différentes communautés, & ont leurs officiers, confrairies, & maîtres de confrairies.

L'ordonnance de la ville de 1712 a reglé plusieurs points de police qui concernent ces gagne-deniers.

On appelle du même nom à la Douanne de Paris, des gens à qui seuls il appartient de travailler pour la décharge & recharge des marchandises, ballots, balles, tonneaux, &c. qui y sont portés ou qui y arrivent par les carrosses, coches, chariots, charrettes, & autres voitures publiques.

Ils sont choisis par les fermiers généraux, font une espece d'apprentissage, & ne peuvent être reçûs qu'en payant certains droits qui montent à près de huit cent livres.

Ce sont eux qui exécutent les ordres des principaux commis de la douanne, particulierement de l'inspecteur général des manufactures & des visiteurs pour l'ouverture des balles & ballots, & pour l'envoi des draperies à la halle aux draps, des livres à la chambre syndicale des Libraires, & des toiles à la halle de cette marchandise.

Leur nombre n'excede guere celui de vingt ; leurs salaires ne sont pas fixés pour la plûpart, & ils font bourse commune, partageant entr'eux tous les soirs ce qu'ils ont reçû. Dictionnaires de Commerce & de Trévoux. (G)

 

 

REF

 

FRANKLIN (Alfred), Dictionnaire historique des arts, métiers et professions exercé à Paris depuis le XIIIe siècle, Paris, Jean-Cyrille Godefroy, 2004, (réimpression du livre publié par H. Welter éditeur en 1906, p. 352-353 :

 

Gagne-deniers. Ils se divisaient en quatre classes :

1° Les gagne-deniers proprement dits : commissionnaires ; crocheteurs ; forts ; hommes de peine ; portefaix (…).

  Les gagne-deniers sur l'eau : débardeurs ; garçons de la pelle ; plumets ; manieurs (…).

3° Les porteurs spéciaux à certains métiers. Il y a eu des porteurs de bois ; de charbon ; de chaux ; de draps ; de foin ; de grains ; de plâtre ; de sel ; et peut-être d'autres encore (…).

4° Les gagne-deniers ou forts de la douane (…).

Presque tous les gagne-deniers étaient reconnaissables à une médaille spéciale, qu'ils devaient porter en évidence sur leurs vêtements (…).

 

LACHIVER (Marcel), Dictionnaire du monde rural. Les mots du passé, Paris, A. Fayard, 1997, p. 840 :

 

Gagne-denier, s.m. 1. sous l'Ancien Régime, nom d'une sorte de profession qui consistait à faire des commissions pour le service d'autrui à un prix qui, lorsqu'il était question d'affaires pécuniaires, était ordinairement d'un denier la livre (1/240)./ Terme d'anc. Administ. Employé subalterne qui avait la charge de mesurer et de tasser le bois dans les membrures en présence des jurés./ Les gagne-deniers charbonniers étaient appelés garçons de la pelle, et les valets des porteurs, plumets (…).

 

 

MIN

 

Le terme de "gagne-denier" ne se trouve que dans les minutes de la justice de paix de la Section du jardin des plantes de Paris. Cette situation sociale, comme l'indique l'Encyclopédie - et comme le confirme l'article qui lui est consacré dans le Dictionnaire des petits métiers de Paris – est typique de la capitale et n'est jamais évoquée ni dans les archives dépouillées pour les cantons de Moulins-Ouest, de Bellenaves et d'Ébreuil dans l'Allier, ni dans celles qui ont été étudiées par les auteurs pour le canton de Boissise-la-Bertrand en Seine-et-Marne.

 

 

Exemple d'une demande faite par un gagne-denier de Paris devant le juge de paix de la Section du Jardin des plantes (7 octobre 1791)

 

"Cejourdhuy sept octobre mil sept cent quatre vingt onze (…) sont compparus sr. Francois Hattier gagnedenier demt. a Paris rue des fossés St Bernard et sr. Jean Trouchot logeur et boucher a Paris y demt. rue du bon puit d'une part et Jean Boudrot gagnedenier demt. a Paris rue de Versailles d'autre part et sr. Nicolas Bouquet me. de berge du sr. Granier md. de bois au chantier du faubourg porte St. Bernard, demt. ledit sr. Bouquet quay St. Bernard encore d'autre part, lesquels nous ont demandé jugement sur le differend qui s'est elevé entre les srs. Hattier et Trouchot d'un coté et le sr. Boudrot dautre coté et le sr. Grenier au sujet des sommes que les srs. Hattier et Trouchot pretendent leur etre dues par le sr. Boudrot savoir (…)".

 

Orthographe et ponctuation conservées

 

 

Exemple d'un témoignage présenté par un gagne-denier de Paris devant le juge de paix de la Section des Sans-culottes (ex Section du Jardin des plantes), les 16 et 23 février 1793)

 

"Cejourdhuy 16 fevrier mil sept cent quatre vingt treize lan deuxieme de la republique francaise (…) est comparu le citoyen Guillaume Dupuis voiturier et Marie Madeleine Gosse sa femme demt. rue St Victor au buisson ardent, demandeurs aux fins de l'exploit de citation esté a leur requete par Malgras hr. commis pour le service de notre juridiction au citoyen Francois Quinet voiturier demt. a Paris rue d'enfer au Petit Luxembourg, deffendeur, tendant ledit exploit a ce que ledit deffendeur soit condamné a payer aux demandeurs la somme de cinq cent livres par forme de dommages interets, pour le deffendeur avoir agi de voies de faits envers la femme Dupuis le six fevrier pt. mois au devant de la porte du chantier du fbg. situé dans l'arrondissement de la section des sans culottes (…).

(…) Cejourdhuy vingt trois fevrier lan deuxieme de la republique francaise (…), est comparu le citoyen Coudray (…), nous a dit se nommer Etienne Coudrai, gagne denier, agé de soixante ans (…) demt. rue dArras n° 9 ; a deposé qu'il a vu le cit. Quinet retirer la fe. Dupuis par le bras d'aupres d'une voiture qui entroit dans le chantier ; que c'etoit la voiture de Quinet qui entroit dans le chantier ; qu'il a entendu dire a la citoyenne Dupuis en arretant la voiture : "Vous n'entrerez pas pour charger la voix. Voilà ma voiture qui vient" ; qui est tout ce qu'il a dit savoir ; et a lui lecture faite de sa deposition a declaré qu'elle contenoit verité, y a persisté et a requis taxe que nous lui avons faite de quinze sols ; et a declaré ne savoir signer (…)".

 

Orthographe conservée. Ponctuation modernisée

 

 

 

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