G.-J.B. Target (1733-1807)

Un glossaire des termes rencontrés

Propriétaire

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ENC

 

PROPRIÉTAIRE, s. m. (Jurisprud.) est celui qui a le domaine d'une chose mobiliaire ou immobiliaire, corporelle ou incorporelle, qui a droit d'en jouir & d'en faire ce que bon lui semble, même de la dégrader & détruire, autant que la loi le permet, à-moins qu'il n'en soit empêché par quelque convention ou disposition qui restraigne son droit de propriété.

Le droit du propriétaire est bien plus étendu que celui de l'usufruitier ; car celui-ci n'a que la simple jouissance, au lieu que le propriétaire peut uti & abuti re suâ quatenùs juris ratio patitur.

Ainsi le propriétaire d'un héritage peut changer l'état des lieux, couper les bois de haute-futaie, démolir les bâtimens, en faire de nouveaux, & fouiller dans l'héritage si avant qu'il juge à propos, pour en tirer de la marne, de l'ardoise, de la pierre, du plâtre, du sable, & autres choses semblables.

Le propriétaire d'un héritage jouit en cette qualité de plusieurs priviléges.

Le premier est que lorsqu'il vient d'acquérir l'héritage, il peut résilier le bail fait par son vendeur, quand même ce ne seroit pas pour occuper en personne, & sans être tenu d'aucune indemnité envers le locataire, sauf le recours de celui-ci contre le vendeur, lib. XXV. §. 1. ff. locati, & l. IX. cod. de locato cond.

Le second privilége du propriétaire est qu'il peut évincer le locataire auquel il a lui-même passé bail, pourvu que ce soit pour occuper en personne ; c'est ce qu'on appelle le privilége de la loi oede, parce qu'il est fondé sur la loi 3 au code locato, qui commence par ce mot oede.

Ce privilége n'appartient qu'à celui qui est propriétaire de la totalité de la maison, & non à celui qui n'en a qu'une partie, même par indivis, à-moins qu'il n'ait le consentement par écrit de ses co-propriétaires.

Le locataire même de la totalité, ne jouit pas de ce droit.

Mais une mere tutrice de sa fille qui demeure avec elle, peut user de ce droit au nom de sa fille.

Ce privilége n'a lieu que pour les maisons, & non pour les fermes des champs.

Quand le propriétaire a expressément renoncé à ce privilége, il ne peut plus en user ni son héritier ; mais cela ne lie pas les mains de l'acquéreur, à moins que le propriétaire n'eût expressément affecté la propriété à l'execution du bail ; car en ce cas, le bail seroit une charge réelle.

Le propriétaire qui use du privilége de la loi oede, doit une indemnité au locataire ; cette indemnité s'évalue ordinairement au tiers du loyer qui reste à écouler ; par exemple, s'il reste trois années à expirer, & que le loyer fût de 1000 livres par an, l'indemnité sera de 1000 livres .

Le troisieme privilége du propriétaire est celui qu'il a pour être payé des loyers ou fermages à lui dûs par préférence aux autres créanciers.

Pour les loyers d'une maison il est préféré à tous créanciers, même aux frais funéraires, sur le prix des meubles dont le locataire a garni les lieux.

Ce privilége a lieu, quoique le propriétaire ne soit pas le premier saisissant, mais il faut qu'il ait formé son opposition avant que les meubles soyent vendus par justice. Coutume de Paris, article 171.

Le propriétaire n'est ainsi préféré que pour les trois derniers quartiers & le courant, à-moins que le bail n'ait été passé devant notaire ; auquel cas le privilége auroit lieu pour tous les loyers échus & à échoir.

Les meubles des sous-locataires ne sont obligés envers le propriétaire, que pour le loyer de la portion qu'ils occupent. Coutume de Paris, article 172.

La même coutume, article 171, autorise le propriétaire à faire procéder par voye de gagerie sur les meubles étant en sa maison, pour le louage à lui dû. Voyez GAGERIE & SAISIE.

Quand les meubles sont transportés hors de la maison, le propriétaire perd son privilége sur ces meubles.

Mais si les meubles ont été enlevés sans son consentement, il peut les revendiquer comme son gage, & les faire réintégrer dans la maison pour la sûreté de ses loyers.

Le droit romain ne donne de privilége au propriétaire d'une ferme de campagne pour être payé de ses fermages, que sur les fruits recueillis dans sa ferme.

Ce privilége sur les fruits a lieu, soit que le fermier exploite lui-même, ou qu'il ait subrogé une autre personne en sa place, ou qu'il ait sous-fermé.

Mais le droit romain ne donne au propriétaire de la ferme aucun privilége sur les meubles & ustensiles, qu'au cas qu'il ait été ainsi stipulé.

Cependant la coutume de Paris, article 171, accorde un privilége sur les meubles pour les fermes comme pour les maisons en faveur des propriétaires. Cette disposition étant singuliere, ne doit point être admise dans les coutumes qui ne l'ordonnent point ainsi. Voyez au digeste le titre locati conducti, & au code le titre de locato conducto ; Louet & Brod. lettre f, tome IV. & Coquille, quest. & rép. art. 102 ; le Prêtre, arrêts de la cinquieme & seconde cent. ch. lvij. Henrys, tome I. liv. IV. ch. vj. quest. 27. Journ. des aud. tome I. livre VIII. ch. xxv. & les mots ACHAT, BAIL, FERME, FERMAGE, LOYER. (A).

 

 

LEG

 Constitution de 1791 – Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (26 août 1789)

 (…) Art. 2. – Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression.

(…) Art. 17. – La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité.

   

Constitution de 1793 – Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (24 juin 1793)

 

(…) Article premier; - Le but de la société est le bonheur commun. Le gouvernement est institué pour garantir à l'homme la jouissance de ses droits naturels et imprescriptibles.

Art. 2. – Ces droits sont l'égalité, la liberté, la sûreté, la propriété.

(…) Art. 16. – Le droit de propriété est celui qui appartient à tout citoyen de jouir et de disposer à son gré de ses biens, de ses revenus, du fruit de son travail et de son industrie.

(…) Art. 19. – Nul ne peut être privé de la moindre portion de sa propriété sans son consentement, si ce n'est lorsque la nécessité publique légalement constatée l'exige, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité.

   

Constitution de l'an III – Déclaration des droits et des devoirs de l'homme et du citoyen (5 fructidor an III-22 août 1795)

 Droits

 Article premier. – Les droits de l'homme en société sont la liberté, l'égalité, la sûreté, la propriété.

(…) Art. 5. – La propriété est le droit de jouir et de disposer de ses biens, de ses revenus, du fruit de son travail et de son industrie.

 

Devoirs

 (…) Art. 8. – C'est sur le maintien des propriétés que reposent la culture des terres, toutes les productions, tout moyen de travail, et tout l'ordre social.

Art. 9. – Tout citoyen doit ses services à la patrie et au maintien de la liberté, de l'égalité et de la propriété, toutes les fois que la loi l'appelle à les défendre.

 

 

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REF

 

Marcel LACHIVER, Dictionnaire du monde rural. Les mots du passé, Paris, A. Fayard, 1997, p. 1 127

 

Propriété, s.f. 1. La chose qui appartient en propre à quelqu'un. 2. Bien-fonds, terres, maisons. /  Grande, petite, moyenne propriété

   

 

MIN:

 

Extrait d'une minute de la justice de paix d'Ébreuil (Allier) concernant un conflit de propriété (7 septembre 1792)

 

"Aujourd'hui vendredi sept septembre 1792, l 'an quatre de la liberté et le premier de l'égalité, devant nous, Antoine Juge, juge de paix du canton d'Ébreuil, assisté des sieurs Nicolas François Ballet et Louis Marcoux, nos assesseurs,

a comparu Louis Coulon, citoyen demeurant au bourg et paroisse de Saint-Bonnet-de-Rochefort,

et Louis Balard, citoyen demeurant à Neuviat, paroisse de Bègues.

Ledit Coulon demandeur relativement à ce qu'il est propriétaire d'un champ situé au terroir de La Verne , paroisse de Saint-Bonnet, joignant de bise la terre dudit Louis Balard, dans laquelle terre il y a plusieurs arbres chênes ; qu'il y a environ quinze jours, ledit Balard s'est permis d'arracher un gros chêne dans icelle ; pourquoi ledit Coulon demande que ledit Balard soit condamné en quinze louis de dommages intérêts et aux dépens (…)

Ledit Balard étant comparu (…) a soutenu avoir la possession dudit arbre chêne par lui coupé pour l'avoir retaillé continuellement. Et ledit Coulon a aussi soutenu avoir retaillé ledit arbre et avant lui son prédécesseur (…)".

 

Orthographe et ponctuation modernisées

 

 

Extrait d'une minute de la justice de paix de la section des Sans-culottes (ex section du Jardin des plantes) concernant une location de bien immeuble (11 juillet 1793)

 

"Cejourdhui onze juillet mil sept cent quatre vingt treize l'an deuxieme de la republique francaise pardevant nous Jean Baptiste Louis Lessore juge de paix de la section des sans culottes a paris assisté des citoyens Felix et Thomas nos assesseurs en notre audiance tenante en notre demeure Rue des fossés Saint Bernard N° 38

Est comparue la citoyenne femme Delespy tant pour elle que pour son mari demt a paris rue neuve Saint Etienne demanderesse aux fins de l'exploit de citation du neuf juillet present mois (…) signiffié au citoyen Prudhomme md fruitier cidevt ppal locataire de la maison ou il demeure sise à paris rue Saint Victor vis-à-vis le cloutier deffendeur compt en personne

Tendant ledit exploit a ce que faute par le deffendr d'avoir satisfait à la sommation a lui faite (…) d'avoir remis toutes les clefs de porte du deuxieme etage de lad. maison rue Saint Victor, et des autres chambres qui ne sont pas louées par les demandeurs en lad. maison ; et d'avoir lesd. lieux en etat de réparations locatives (…)".

 

Orthographe et ponctuation conservées

 

 

 

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